Victor Hugo - Dans l`alcôve sombreVictor Hugo - Dans l`alcôve sombre
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Beau, frais, souriant d`aise à cette vie amère. Sainte-Beuve
Dans l`alcôve sombre,
Près d`un humble autel,
L`enfant dort à l`ombre
Du lit maternel.
Tandis qu`il repose,
Sa paupière rose,
Pour la terre close,
S`ouvre pour le ciel.
Il fait bien des rêves.
Il voit par moments
Le sable des grèves
Plein de diamants ;
Des soleils de flammes,
Et de belles dames
Qui portent des âmes
Dans leurs bras charmants.
Songe qui l`enchante !
Il voit des ruisseaux.
Une voix qui chante
Sort du fond des eaux.
Ses soeurs sont plus belles.
Son père est près d`elles.
Sa mère a des ailes
Comme les oiseaux.
IL voit mille choses
Plus belles encor ;
Des lys et des roses
Plein le corridor ;
Des lacs de délice
Où le poisson glisse,
Où l`onde se plisse
A des roseaux d`or !
Enfant, rêve encore !
Dors, ô mes amours !
Ta jeune âme ignore
Où s`en vont tes jours.
Comme une algue morte
Tu vas, que t`importe !
Le courant t`emporte,
Mais tu dors toujours !
Sans soin, sans étude,
Tu dors en chemin ;
Et l`inquiétude,
A la froide main,
De son ongle aride
Sur ton front candide
Qui n`a point de ride,
N`écrit pas : Demain !
Il dort, innocence !
Les anges sereins
Qui savent d`avance
Le sort des humains,
Le voyant sans armes,
Sans peur, sans alarmes,
Baisent avec larmes
Ses petites mains.
Leurs lèvres effleurent
Ses lèvres de miel.
L`enfant voit qu`ils pleurent
Et dit : Gabriel !
Mais l`ange le touche,
Et, berçant sa couche,
Un doigt sur sa bouche,
Lève l`autre au ciel !
Cependant sa mère,
Prompte à le bercer,
Croit qu`une chimère
Le vient oppresser.
Fière, elle l`admire,
L`entend qui soupire,
Et le fait sourire
Avec un baiser.
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