Victor Hugo - ÉclaircieVictor Hugo - Éclaircie
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L`océan resplendit sous sa vaste nuée.
L`onde, de son combat sans fin exténuée,
S`assoupit, et, laissant l`écueil se reposer,
Fait de toute la rive un immense baiser.
On dirait qu`en tous lieux, en même temps, la vie
Dissout le mal, le deuil, l`hiver, la nuit, l`envie,
Et que le mort couché dit au vivant debout :
Aime ! et qu`une âme obscure, épanouie en tout,
Avance doucement sa bouche vers nos lèvres.
L`être, éteignant dans l`ombre et l`extase ses fièvres,
Ouvrant ses flancs, ses reins, ses yeux, ses coeurs épars,
Dans ses pores profonds reçoit de toutes parts
La pénétration de la sève sacrée.
La grande paix d`en haut vient comme une marée.
Le brin d`herbe palpite aux fentes du pavé ;
Et l`âme a chaud. On sent que le nid est couvé.
L`infini semble plein d`un frisson de feuillée.
On croit être à cette heure où la terre éveillée
Entend le bruit que fait l`ouverture du jour,
Le premier pas du vent, du travail, de l`amour,
De l`homme, et le verrou de la porte sonore,
Et le hennissement du blanc cheval aurore.
Le moineau d`un coup d`aile, ainsi qu`un fol esprit,
Vient taquiner le flot monstrueux qui sourit ;
L`air joue avec la mouche et l`écume avec l`aigle ;
Le grave laboureur fait ses sillons et règle
La page où s`écrira le poëme des blés ;
Des pêcheurs sont là-bas sous un pampre attablés ;
L`horizon semble un rêve éblouissant où nage
L`écaille de la mer, la plume du nuage,
Car l`Océan est hydre et le nuage oiseau.
Une lueur, rayon vague, part du berceau
Qu`une femme balance au seuil d`une chaumière,
Dore les champs, les fleurs, l`onde, et devient lumière
En touchant un tombeau qui dort près du clocher.
Le jour plonge au plus noir du gouffre, et va chercher
L`ombre, et la baise au front sous l`eau sombre et hagarde.
Tout est doux, calme, heureux, apaisé ; Dieu regarde.
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