Victor Hugo - A quoi songeaient les deux cavaliers ...Victor Hugo - A quoi songeaient les deux cavaliers ...
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La nuit était fort noire et la forêt très-sombre.
Hermann à mes côtés me paraissait une ombre.
Nos chevaux galopaient. A la garde de Dieu !
Les nuages du ciel ressemblaient à des marbres.
Les étoiles volaient dans les branches des arbres
Comme un essaim d`oiseaux de feu.
Je suis plein de regrets. Brisé par la souffrance,
L`esprit profond d`Hermann est vide d`espérance.
Je suis plein de regrets. O mes amours, dormez !
Or, tout en traversant ces solitudes vertes,
Hermann me dit : «Je songe aux tombes entr`ouvertes ;»
Et je lui dis : «Je pense aux tombeaux refermés.»
Lui regarde en avant : je regarde en arrière,
Nos chevaux galopaient à travers la clairière ;
Le vent nous apportait de lointains angelus; dit :
«Je songe à ceux que l`existence afflige,
A ceux qui sont, à ceux qui vivent. -- Moi, lui dis-je,
Je pense à ceux qui ne sont plus !»
Les fontaines chantaient. Que disaient les fontaines ?
Les chênes murmuraient. Que murmuraient les chênes ?
Les buissons chuchotaient comme d`anciens amis.
Hermann me dit : «Jamais les vivants ne sommeillent.
En ce moment, des yeux pleurent, d`autres yeux veillent.»
Et je lui dis : «Hélas! d`autres sont endormis !»
Hermann reprit alors : «Le malheur, c`est la vie.
Les morts ne souffrent plus. Ils sont heureux ! j`envie
Leur fosse où l`herbe pousse, où s`effeuillent les bois.
Car la nuit les caresse avec ses douces flammes ;
Car le ciel rayonnant calme toutes les âmes
Dans tous les tombeaux à la fois !»
Et je lui dis : «Tais-toi ! respect au noir mystère !
Les morts gisent couchés sous nos pieds dans la terre.
Les morts, ce sont les coeurs qui t`aimaient autrefois
C`est ton ange expiré ! c`est ton père et ta mère !
Ne les attristons point par l`ironie amère.
Comme à travers un rêve ils entendent nos voix.»
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